dimanche 16 mai 2010

JStreet ne soutient pas JCall !!!

Contexte:
- JCALL, un parchemin élaboré au CCLJ à Bruxelles
- J Call, un appel pour rien
- JCALL n'a pas invité les European Friends of Israel du Parlement européen

Claude Kandiyoti, tout en pointant les lacunes du texte, explique dans Contact J, la revue du Cercle Ben Gourion, les raisons qui l'ont amené à signer la pétition Appel à la Raison (alias JCall) publiée en exclusivité mondiale dans le Le Soir (20/04/2010), quotidien réputé pour ses prises de position anti-israéliennes. 

JCall ambitionnait de devenir le pendant européen du mouvement JStreet né aux États-Unis en 2009.  Les Européens ont cru, un peu hâtivement, pouvoir compter sur le soutien de JStreet.  D'ailleurs la présence d'une délégation du groupe américain était annoncée pour le lancement de JCall au Parlement européen.  Mais on ne les a pas vus. Les dirigeants de JStreet n'ont pas signé l'Appel à la Raison.  On ne trouve aucune mention de JCall sur le site de JStreet.

JStreet a tout simplement désavoué l'initiative européenne, comme l'écrit Claude Kandiyoti :

"La réalité européenne est très différente de la réalité américane où il y avait un réel besoin d'un mouvement pro-Israël, alternatif à l'AIPAC.  Par ailleurs, JStreet n'appuie pas cette initiative et l'a d'ailleurs communiqué officiellement."
Déjà une pléthore de JCallistes en Europe

En effet, il y a en Europe de nombreux JCallistes et de ce fait la création médiatisée d'un collectif européen critique d'Israël et qui demande non seulement à l'Europe de faire des pressions sur Israël, mais adresse cet appel également aux États-Unis, ne se justifiait pas.  JStreet, qui ne donne pas de leçons à l'Europe mais limite son champ d'action aux seuls États-Unis, a tout à fait raison d'avoir signifié officiellement, mais dans la discrétion et sans tapage - tout le contraire de JCall - sa désapprobation.

Evelyn Gordon explique magistralement dans Commentary (JCall and the Distress of European Jewry) ce qu'en réalité représente JCall :

"JCall, un groupe de pression qui vient d'être créé en Europe, soulève une question troublante: comment se fait-il que des intellectuels pro-israéliens, comme Alain Finkielkraut et Bernard-Henri Lévy, soutiennent une initiative qui est à la fois anti-Israël et intellectuellement incohérente?


JCall a présenté cette semaine une pétition [3 mai] au Parlement européen qui stipule que l'avenir d'Israël "dépend de" la paix avec les Palestiniens et que par conséquent l'Union européenne doit "faire pression sur les deux parties". En prenant congé de toute prétention d'impartialité les rédacteurs ajoutent que "L’alignement systématique sur la politique du gouvernement israélien est dangereux car il va à l’encontre des intérêts véritables de l’État d’Israël". Aucun avertissement comparable n'est émis à l'égard de la politique de l'Autorité palestinienne, dont certains aspects mettent clairement Israël en danger.

Invité à commenter cette disparité, le membre fondateur David Chemla [en fait ce texte a été initié en Belgique par Élie Barnavi et David Susskind] a confié au Jerusalem Post: "En tant que Juifs attachés à Israël, nous parlons aux Israéliens. Il s'agit donc d'un appel aux Israéliens. "

Cela n'a évidemment aucun sens: si JCall voulait vraiment s'adresser aux Israéliens, le pétition aurait dû être adressée à la Knesset - et non au Parlement européen qui est virulemment anti-israélien et qui a, il y a deux mois, entériné les allégations du rapport Goldstone sur les "crimes de guerre" israéliens à Gaza. A l'inverse, le Congrès des États-Unis a dénoncé le rapport comme étant irrémédiablement biaisé.

Et ce contraste met en évidence une incohérence intellectuelle encore plus grave dans la position de JCall. JCall, comme JStreet, sur lequel il prend consciemment modèle, s'oppose à "délégitimation et au boycott d'Israël", d'après ce qu'a déclaré David Chemla à Haaretz. Or la réalité est que l'Amérique pourrait diminuer son soutien à Israël à bien des égards sans avoir recours au boycott, au désinvestissement et aux sanctions (boycott/divestment/sanctions). Ce n'est pas le cas de l'Europe.

Car contrairement aux États-Unis l'Union européenne ne vote pas contre les résolutions anti-israéliennes à l'ONU, ne fournit pas d'aide financière à Israël, n'est pas un des principaux fournisseurs d'armes à Israël, et ne défend pas publiquement (ou tout au moins ne s'abstient de condamner) les mesures israéliennes de contre-terrorisme. En effet, la seule contribution majeure de l'Union européenne au bien-être d'Israël est économique: elle est le plus important partenaire commercial d'Israël.

Par conséquent lorsqu'on exhorte l'Europe à faire "pression" sur Israël, on prône effectivement le boycott, le désinvestissement et les sanctions. C'est le seul mécanisme dont dispose l'Union européenne pour faire pression sur Israël.

David Chemla a toutefoirs insisté que l'appel de JCall va "effectivement aider à améliorer l'image d'Israël en Europe", en montrant que la communauté juive "n'est pas monolithique". Comment l'image qu'ont les Européens d'Israël peut s'améliorer lorsque des Juifs de premier rang font savoir qu'Israël est le principal coupable du conflit demeure un mystère !

Ce qui n'est pas un mystère c'est comment cette initiative pourrait améliorer l'image des Juifs européens. Dans un continent où les sondages d'opinion montrent les unes après les autres qu'Israël est largement détesté, le simple fait de suggérer qu'Israël n'est pas le seul responsable vous rend suspect. Mais si vous exhortez l'UE à suspendre son soutien au gouvernement d'Israël, mais pas à l'Autorité palestinienne - et si de surcroît vous déclarez qu'une telle mesure sert "les vrais intérêts" d'Israël, de manière à ce que les Européens n'aient à avoir aucun problème de conscience, alors vous rejoignez vous-même le consensus à l'européenne. Vous aurez montré, comme le déclare la la pétition de JCall, que vous aussi, vous avez entendu "la voix de la raison" - tout au moins telle que l'Europe la définit de nos jours.

Aujourd'hui il est dur d'être un Juif en l'Europe. Il est donc compréhensible que certains s'accrochent à n'importe quoi, même si leur choix est irrationnel, pourvu que leur démarche soit étiquetée "pro-Israël" tout en ne violant pas le consensus européen. Mais leurs frères israéliens et américains doivent leur rappeler la vérité : être "pro-israélien" dans l'Europe d'aujourd'hui exige de rappeler la culpabilité des Palestiniens, que les Européens ignorent régulièrement, plutôt que de renforcer le réflexe de "blâmons Israël". Et il faut se battre contre des "pressions" qui ne peuvent que se traduire par les BDS (le boycott, le désinvestissement et les sanctions)."

De nombreuses voix se sont également élevées en Europe pour dénoncer cette initiative.  Une des plus notables est "Raison Garder" qui connaît un franc succès http://www.dialexis.org/php/index.php.

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