Nous retiendrons Informer : mission impossible ? Dans cet article Sabine Verhest fait la recension de l'ouvrage de Joris Luyendijk, journaliste au journal néerlandais NRC Handelsblad sur le métier de correspondant étranger au Moyen-Orient "Des hommes comme les autres".
Les thèses de Luydendijk sont simples.
Simple du côté arabe - ce sont des despotes qui contrôlent les pays et les médias : ""Dans le monde arabe, le journalisme est impossible", assène-t-il. Parce que les régimes sont dictatoriaux, les statistiques inexistantes, les manifestations organisées."
Simple du côté israélien - ce sont de redoutables et cyniques manipulateurs :
"Il témoigne, analyse la force des mots, la partialité du langage - "les Palestiniens qui usent de la violence contre des civils israéliens sont des "terroristes", des Israéliens qui usent de la violence contre des civils palestiniens sont des "faucons" ou des "durs"."
"Du précuit de A à Z" ou le scandale d'oser montrer la bonne entente entre Israéliens et Palestiniens
"Images positives" : Joris Luyendijk et Sabine Verhest semblent trouver que c'est une honte que les Israéliens aient osé montrer qu'en pleine intifiada la bonne entente entre Palestiniens et des Israéliens - des enfants juifs, chrétiens et musulmans fréquentaieient la même école, que des musiciens jouaient ensemble et que des adultes cueillaient des olives ensemble... Cette réalité choque les Européens.
"L’auteur décrit ainsi la redoutable efficacité de la machine médiatique israélienne qui prémâche les informations à destination des médias internationaux et les leur livre sur un plateau d’argent. Dans le centre de presse aménagé lors de la seconde intifada, "il y avait une pile de "récits optimistes" à l’attention des correspondants. Du précuit de A à Z : des enfants juifs, chrétiens et musulmans à la même école, la cueillette des olives par des Israéliens et des Palestiniens, des musiciens des deux communautés jouant dans le même orchestre ". On a tous vu de ces images positives dans les journaux télévisés.
"Les Palestiniens, bien qu’ils soient, aux yeux du journaliste néerlandais, nettement moins doués pour faire passer leurs messages que les Israéliens, ne sont pas en reste. Joris Luyendijk s’est un jour rendu à Gaza pour récolter des témoignages de victimes de bombardements. "Alors que je filais, je vis quelqu’un placer des vêtements d’enfant dans les décombres. Des équipes de télévision étaient annoncées.""
On notera que même si les Palestiniens font une petite mise en scène pour les équipes de télévision, ils ont été "victimes de bombardements" des Israéliens qui n'ont laissé que des "décombres".
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Le journaliste avait déjà dit tout le mal qu'il pense des Israéliens dans un article pour Le Monde Diplomatique Les mots biaisés du Proche-Orient (mars 2007) (extraits):
"Le mot "occupation" peut-il être, lui aussi, vide de sens pour les lecteurs et les téléspectateurs occidentaux ? Un tel vide expliquerait pourquoi on multiplie les pressions sur l’Autorité palestinienne pour qu’elle prouve qu’elle "en fait assez contre la violence" alors qu’on ne demande presque jamais aux porte-parole du gouvernement israélien s’ils "en font assez contre l’occupation". Nul doute qu’en Occident le citoyen sait ce qu’est la menace terroriste, ne serait-ce que parce que les responsables politiques le lui rappellent régulièrement. Mais qui explique aux publics occidentaux la terreur qui se cache derrière le mot "occupation"? Quelle que soit l’année à laquelle on se réfère, le nombre de civils palestiniens tués en raison de l’occupation israélienne est au moins trois fois supérieur à celui des civils israéliens morts à la suite d’attentats. Mais les correspondants et les commentateurs occidentaux, qui évoquent les " sanglants attentats-suicides", ne parlent jamais de la "sanglante occupation".
Si les horreurs quotidiennes de l’occupation israélienne restent largement invisibles, l’"information" provenant des dictatures parvient aux journaux et aux télévisions occidentaux. [...]
Certains mots ne disent rien aux citoyens ordinaires. D’autres évoquent autre chose que ce qu’on a voulu dire. Ils sont intrinsèquement biaisés : quelques minutes de zapping sur les chaînes satellitaires suffisent à le démontrer. Devons-nous dire "Israël", l’"entité sioniste", la " Palestine occupée"? "Intifada", "nouvel Holocauste" [la question qui taraude les journalistes sérieux ...] ou "lutte d’indépendance"? Ce bout de terre est-il "contesté" ou "occupé", et doit-il être "donné" ou "rendu "? Est-ce une "concession" quand Israël remplit une obligation figurant dans un traité qui a été signé? Est-ce qu’il y a "négociation" entre Israéliens et Palestiniens, et si c’est le cas, quelle est la marge de manœuvre des Palestiniens sachant que le terme "négociation" implique des concessions mutuelles entre deux parties plus ou moins égales?"
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